mars
18
2022
Des personnes vulnérables fuient en masse. C'est le chaos aux frontières de l'Ukraine. Pour la première fois dans l’histoire l'ensemble de l'Europe s'unit pour faire face à une crise de réfugiés sans précédent. La Pologne et les autres pays limitrophes ne peuvent pas, seuls, faire face à cet afflux improbable.
Les images de parents et de grands-parents fatigués, ainsi que d'enfants voyageant seuls ou non, désorientés ou en pleurs lors du passage de la frontière, n'ont laissé personne indifférent. Au départ, ce sont les citoyens polonais qui se sont mobilisés, mais très rapidement ce sont des gens de toute l'Europe qui sont venus prêter main forte. Des volontaires au grand cœur, prêts à aider là où ils le peuvent. Distribution de nourriture et de vêtements, coordination des transports, interprétariat, aide médicale, ... beaucoup ne veulent pas rester les bras croisés et prennent eux-mêmes l'initiative.
Il est évidemment crucial que nous soutenions les réfugiés de guerre contraints d’abandonner tous leurs biens, et même leurs proches. Mais ce que nous devons garantir à tout moment, c'est que ces personnes vulnérables ne deviennent pas victimes d'exploitation. Nous devons prévenir que les plus vulnérables d'entre eux, comme les mineurs non accompagnés, ne disparaissent ou ne soient exploités par des personnes aux mauvaises intentions. Certains profitent du chaos et y voient une opportunité pour passer à l’attaque sans être inquiétés.
De l’ordre dans le chaos
Si des initiatives privées sont autorisées sans aucun contrôle, les trafiquants et les personnes mal intentionnées ont le champ libre. Chaque jour, des particuliers partent avec des camionnettes vers la frontière avec l'Ukraine pour ramener des réfugiés, y compris des mineurs non accompagnés, vers l’Europe occidentale. Reste à savoir s'ils arrivent effectivement ici et/ou s'ils sont enregistrés. Les personnes ayant de mauvaises intentions ne sont, par exemple, pas désireuses d'enregistrer les enfants dans un centre d'enregistrement.
L'afflux de mineurs non accompagnés est énorme. De nombreuses mères restent en Ukraine pour aider leurs maris et leurs fils adultes mobilisés. Ils envoient leurs enfants mineurs traverser la frontière seuls, en quête de sécurité. Cet afflux se poursuit sans relâche. Nous craignons également que le président ukrainien Zelensky se voit contraint de diminuer l’âge de la conscription. De nombreuses personnes choisiraient alors d'envoyer leurs enfants de 16-17 ans passer la frontière pour éviter cela.
Chaque crise présente des opportunités
Il est de notre devoir de veiller à ce que les enfants ukrainiens, qui nous sont confiés par les parents afin de les protéger, ne se retrouvent pas seuls, ne disparaissent pas ou ne soient pas victimes d'abus ou d'exploitation. Pour cela, il est nécessaire de mettre urgemment sur pied des mécanismes de protection et de coordination. Un devoir pour les pays frontaliers (avec un soutien supplémentaire de l'UE), mais également pour nous, en Belgique.
Nous devons tirer des leçons des crises précédentes. La COVID-19 nous a appris l'importance des 3 C : unité de contrôle, commandement et communication. Plus précisément, nous recommandons :
- de créer une cellule de crise au niveau fédéral qui coordonne l'afflux, l'accueil et l’accompagnement des réfugiés ukrainiens, en accordant une attention particulière aux personnes les plus vulnérables, comme les mineurs non accompagnés ;
- de garantir de façon professionnelle le trajet, l’enregistrement et l’accueil des mineurs non accompagnés et ne pas laisser ceci à une initiative privée incontrôlée. Si des problèmes surviennent, il faut pouvoir s’appuyer sur un accueil professionnel ;
- d’investir d’urgence plus de moyens pour les tuteurs professionnels qui peuvent contribuer à assurer ce cadre, afin que les droits de ces enfants soient toujours garantis ;
- de filtrer minutieusement toutes les initiatives privées, en particulier envers les mineurs ;
- d’offrir un cours accéléré sur la détection de la traite des êtres humains aux services de placement familial, aux tuteurs et aux villes et communes.
Nous avons grandement besoin d'une action coordonnée. Aujourd'hui. Pas demain. Maintenant.
Heidi De Pauw,
Directrice Child Focus